Barbara Chase - Riboud @Palais de Tokyo |
On me l'avait cachée. Je n'avais jamais entendu parler, ni comme artiste, ni comme femme de.
Pourtant de lui j'en a vu des expositions, regarder des bouquins de photos. J'ai même vu un expo de ses photos quand nous habitions Chine, cela avait été une bouffée de beau dans notre vie chinoise.
Et soudain, un hommage lui - à elle - est rendu dans huit musées parisiens. Pas une grande retrospective, mais des bouts d'expos à plusieurs endroits en même temps.
Barbara Chase Riboud, femme de Marc Riboud.
La dame américaine a 85 ans, vit en France depuis plus de 40 ans et n'est plus mariée à Marc Riboud depuis au moins 40 ans et pourtant, elle continue d'être appelée Chase - Riboud. C'est une artiste multi-étiquette, scupltrice, plasticienne, autrice poétesse...Touche à tout.
C'est au Palais de Tokyo que je suis allée la voir. Une salle au fond, rien que pour elle, après la grande (et magnifique) fresque d'une autre femme (Malala Andrialavidrazana), pour Quand un noeud est dénoué, un dieu est libéré.
Rien que le titre m'incitait à me déplacer.
Peu de choses, beaucoup de sens, beaucoup de résonance. 7 sculptures, noires, verticales, pareilles dans leur forme, différentes parce que résultant de l'agencement des mêmes 8 morceaux. Chaque sculpture en hommage à une poétesse oubliée : Nossis (3è avant JC), Lady Kaza (8è siècle), Enheduanne (23è avant JC), Zhijo Wen Jun (1er avant JC), Umm Jamil Cleobuline (6è avant JC), Sulpicia (1er avant JC).
Des poétesse grecque, romaine, japonaise, chinoise, arabe...
Un joli panel d'oubliées.
Une femme peu connue célébrant des oubliées.
Une longue chaine de solidarité.
C'est un peu le sort réservé aux artistes femmes. Ce n'est pas par son premier mari qu'on a entendu parler d'elle. A se demander à quoi ils (nous) servent.
A la libraire, il n'y avait pas ses livres, mais une publication de AWARE sur une série d'entretiens avec elle.
AWARE c'est Archives of Women Artists, Research and Exhibitions qui promeut la connaissance des femmes artistes, celles mortes et passées sous silence et les contemporaines pour les rendre visibles, les promouvoir, les documenter.
Depuis que j'ai découvert cette association, je la croise partout, ou plutôt souvent.
J'ai acheté Elle Magazine avant Noël et 2 pages étaient consacrées à l'association.
Réaction de mon iMari au magazine sur la table "tu vas bien? Ça fait une éternité que tu n'as pas acheté ça". Quel bel esprit d'observation. J'achetais Elle Magazine aux vacances, quand les enfants étaient petits et que enfin la rythme allait ramener, que j'allais reposer mon cerveau aussi en lisant des trucs légers.
En décembre, je l'ai acheté pour lire l'interview qu'une cliente y avait donné. Je me suis trompée de semaine, l'interview n'y était pas, mais il y avait tout un article sur AWARE et une des ses fondatrices Camille Morineau, aux débuts de l'association, à ses réalisations passées et ses projets. Notamment une exposition consacrée aux oeuvres des femmes des réserves de Beaubourg, je me demande comment j'ai pu passer à côté d'un truc comme ça, avant de me rendre compte que c'était en 2009 : j'habitais en Chine.
On peut se réjouir de cette initiative qui fait tache d'huile et a des effets puisque d'autres expositions de femmes sont prévues : Suzanne Valadon à Beaubourg, a une petite série animée sur AWARE, et Artemisia Gentileschi sera au Musée Jacquemart André cette année à quelques entrées mais pas encore sa page sur ce site.
J'avais croisé Artemisia cet été dans "ces héroïnes qui peuplent mes nuits" de Mia Kankimaki, voila que cette année une exposition lui est consacrée. Elle a une drôle d'histoire Artemisia : elle a porté plainte contre son violeur, en a fait un cheval de bataille, l'a retranscrit dans sa peinture. Mia Kankimaki raconte une partie de sa vie dans Ces héroïnes qui peuplent mes nets, et ce récit est bien plus intéressant que Wikipedia. Artemisia a vécu (et bien vécu) de sa peinture au 17è siècle. Artemisia est un survivante, une warrior et une peintre de la trempe du Caravage, même si je n'aime pas le genre. Elle a mis en peinture la décapitation de son violeur, et d'autres scènes toutes aussi violentes (envers les homes aussi) : elle faisait du revenge rape avant l'heure.
Dans la série de la longue solidarité des femmes, l'exposition Regards sur le travail des femmes de Janine Niepce à la cité de l'économie est un superbe exemple. Que des femmes, par une femme, rassemblées dans une même salle, sous une grande voute, les photos m'ont émues, de voir l'évolution sur la courte période.
J'ai cherché à acheter des cartes, un catalogue de l'exposition ou même un livre sur Janine Niepce ou ses photos. Rien. Rien à la boutique. Même pas un catalogue. Après recherche, peu de livre édités, pas (encore) de Photo Poche, alors que dernièrement Susan Meseilas et Vivian Maier ont été ajoutées.
C'est la galerie Polka qui s'occupe de ses tirages, la même galerie qui représente Marc Riboud (c'est le clin d'oeil du jour). L'exposition se concluait par des portraits de grandes femmes : Simone Veil, Giselle Halimi, Edith Cresson...
Je deviens aussi élective pour les expos que pour la lecture.
Je soutiens à ma manière les femmes, je me glisse dans la longue chaine de solidarité, en n'achetant que des oeuvres de femmes (des photos surtout).
Et les femmes ne se soutiennent pas qu'entre elles, elles soutiennent aussi la planète. Les 8 bonnes résolutions conseillées à notre nouveau premier ministre (Bayrou, il le faut préciser ; par les temps qui courent la nouveauté en matière de gouvernement est sur un rythme plus soutenu que les saisons), sont toutes suggérées par des femmes chercheuses, expertes dans leur domaine.
Je suis tellement cynique qu'en même temps que je m'en réjouis, je me demande si c'set une coïncidence ou si on donne la parole à des femmes parce que le sujet finalement n'est pas si important (vs le budget par exemple?).
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