Fresque de Malala Andrialavizadrazana à Palais de Tokyo |
Nous avons besoin chacun et chacune à sa manière de ces confins où la disgrâce du monde ne peut nous engloutir. Des lieux où se retirer en silence, d’espace où il est possible de rêver plus loin, de terrier où s’inventer d’autres réalités, de livres qui évadent où s’élève la pensée et de poches bien profondes où enfoncer les mains. Autant d’ailleurs intimes ou collectifs, réels ou fictifs, des confins qui peuvent être proches comme lointains car il n’est pas nécessaire de se déplacer pour changer de perspective : c’est un bougé en soi.
Corine Morel Darleux – Alors nous irons chercher la beauté ailleurs
Je manque de confins ou de poches profondes.
Alors je mets un peu de musique dans mon casque, et peut être je devrais ouvrir un livre de poésie ou de photo, me plonger dans des projets de voyages et de randonnées.
malgré l’usure
de tes genoux
tu sais encore marcher
et tu resteras jusqu’au bout
une femme de désir
soulevant à chaque pas
la beauté
endormie sous la poussière
le désir est un horizon
debout
Louise Duprè - Exercices de joie
Ce n'est évidemment pas la prise de note des temps, de la distance, de la performance en face de la météo et du terrain (terre lourde, chemin sec...).J'ai rencontré un jour quelqu'un qui dans un fichier Excel notait où il skiait avec plein de données sur l'état de la neige (couche en cm, qualité ...), la méteo, les descentes etc... c'est avant l'avènement de Strava et autres applis qui consignent tous nos exploits. Sauf les miens, de un je ne fais pas d'exploits et de deux j'ai trop peur des Stravaleaks.
J'ai commencé un carnet de course à pied - une idée de Cécile Coulon (encore!) - où je consigne ce qui me passe par la tête pendant que je cours. Ce sont des confins (ça y ressemble), qui explorent des liens qui se tissent un peu hasard ou qui s'emmêlent comme les fils de mes écouteurs. Au choix.
Son carnet à elle est publié sur Instagram, c'est une forme poétique de la course. Je rappelle que c'est la personne qui pendant qu'elle écrivait la langue des choses cachées, elle courrait dix kilomètres tous les matins comme Murakami l'avait fait pour l'écriture de ses romans.
Mon carnet de course à pied est pour l'instant dans un fichier Word (ça vaut l''Excel des descentes en ski), quelques lignes à chaque sortie. Le test est combien de temps je le tiens et si ce qui y est consigné ne tourne pas en rond, comme la boucle des 400 mètres du stade.
C'est en regardant les autres qu'on se donne des autorisations.
Comme celle de ne pas mettre de réveil le matin en semaine (Cécile Coulon, encore)
Comme celle de ranger sa bibliothèque par couleur sans se sentir ridicule (Rebecca Amsellem).
Comme celle de se laver les dents sur un pied pour la force des chevilles (mon iAdo)
Comme celle d'assumer ma passion pour les chaussettes de marche (mon ostéopathe)
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