Ito Shinsui (1948), reflets du Japon au tournant de la modernité (musée Cernuschi) |
Je l'ai remplacé.
Oui, déjà.
Ce ne devait pas être un si grande passion pour qu'en rien de temps je décide que c'est fini et hop le souffle d'après il est remplacé.
Je l'ai remplacé par Cécile Coulon.
Je viens de finir en moins de deux jours son dernier : La langue des choses cachées.
J'avais aimé les précédents, adoré ses poèmes, et avec celui là je suis tombée en passion, à relire certaines phrases plusieurs fois parce qu'elles sonnent, elles résonnent, elles révèlent autre chose que juste ce qui est écrit, elles ouvrent des espaces où j'avance craintive et curieuse.
Car c'est ainsi que les hommes naissent, vivent et disparaissent, en prenant avec les cieux de funestes engagements : leurs mains caressent et déchirent, rendent la peau si douce qu'on y plonge facilement des lances et des épées.Cécile Coulon - La langue des choses cachées
Ce roman est un bond en avant de l'autrice, ou c'est moi qui la lit mieux, la comprend mieux, l'ingère mieux, la digère en matière qui me tiendrait réveillée la nuit.
Pour la première fois, il y a des dialogues. Il me semble l'avoir entendu dire que jusqu'à présent elle évitait les dialogues (la dose minimale). Elle n'est pas encore au niveau de Sally Rooney (pour qui c'est sa majeur) mais tout de même c'est remarquable, au milieu de tout le reste.
De ces protagonistes qui n'ont pas de noms, ni un seul prénom.
De ces lieux qui sont vivants, collines, forêts, maisons, ruelles.
De ces histoires qui sont partout sauf dans le langage.
De ce qui est relié sans être nommé.
De ce qui fait justice.
(..) de n'être qu'une oreille, qu'une bouche, qu'un coeur et rien d'autre, oui, un coeur, immense et plein d'un langage proche de celui de la mère. Un langage qui se tait pour mieux comprendre, qui s'oublie pour mieux savoir, un langage amplifié de gestes invisibles, de légendes lourdes et scintillantes.Cécile Coulon - La langue des choses cachées
C'est un genre inclassable, sauf dans l'étagère roman.
Elle raconte qu'elle a voulu suivre la méthode de Haruki Murakami et courir tous les jours 10km pendant l'écriture de ce roman, et que c'est certainement cette discipline qui "a musclé son écriture" et lui a donné ce rythme.
Elle et moi ne devons pas courir de la même façon avec ma petite séance de fractionnés de ce matin (j'ai enfin franchi la barre des 9 km/heure youpi!), la seule chose que j'arrive à faire c'est de supprimer le pronom indéfini "on" de ce billet.
Cette prouesse, je la dois à la lecture de La fin des coquillettes - un récit de pâtes et d'épées - de Klaire fait Grr.
Les deux livres ont un commun le genre inclassable, celui-là n'irait pas sur l'étagère romans.
Que voulez vous, il y en a qui lisent l'avenir dans le marc de café, moi c'est le patriarcat dans les nouilles, chacune sa croix.Klaire fait Grr - La fin des coquillettes
La fin des coquillettes est le premier livre publié par Binge Audio qui n'est pas un retranscription des podcasts. Binge Audio, produit les incontournables podcasts : les couilles du la table, le coeur sur la table ... qui décryptent le patriarcat, les relations hommes femmes, et va encore plus loin. Mon iMari s'est cultivé avec ça, il lui a été révélé un monde qui n'existait pas.
Vos angles morts, messieurs.
On est un pronom personnel dit "indéfini", c'est pratique il incarne aussi l'universel.On, c'est tout le monde.Sauf que on, en fait était à l'origine un nom commun, on , c'est homme, qui est passé par les orthographes hom, et om.Notre on, notre universel est un homme. C'est bête pour un truc universel, d'oublier une demi plâtrée de l'univers.Klaire fait Grr - La fin des coquillettes
Ce n'est pas un livre pour les amoureux de la littérature, c'est une balade en terre féministe, un fil de réflexion qui passe par des endroits inattendus, et éclaire l'implicite. Ce livre a l'air d'un texte de onewomanshow, ce qu'il n'est pas, mais je découvre que son autrice crée aussi des spectacles. Il en a le ton, la dynamique , le verbiage, la suite dans les idées.
Il existe clairement de quoi se repaitre après Tesson.
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