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Scène de la vie (pas nécessairement conjugale)

Kong-A Song à l'expo Chagall et moi, au musée Chagall à Nice


Le matin, je traîne au petit déjeuner. Je lis, le temps de finir toute ma théière, et parfois plus longtemps encore, parfois le temps de finir le livre. Cela ne risque pas de m’arriver en ce moment, tellement ce que je lis m’ennuie.
Et comme le iMari ne travaille plus, il passe aussi du temps au petit-déjeuner, et lui se translate du petit-déjeuner au canapé avant d’aller faire tout un tas d’activités variées.
Donc ce matin, je lisais un type qui écrit sa dépression et son ennui au fil des pages, imaginez l’enthousiasme que ça donne pour la journée. 
 
L’heure est venue peut-être de faire ce seul et unique effort : considérer ma vie. Je me vois au cœur d’un désert immense. Je surgis de ce que j’ai été naguère, littéralement parlant, et je tente de m’expliquer comment j’en suis arrivé au point où je suis.
Le livre de l’intranquillité - Fernando Pessoa
Et mon iMari a eu un problème avec sa machine à café. L’engin s’est pris pour un sapin de Noël et a clignoté en tous voyants, sans ne plus fournir une seule goutte du précieux carburant de l’iMari. Celui-ci ne se laisse pas démonter, ni une ni deux, il sort le manuel d’utilisation (organisé l’iMari !), pour constater que le diagnostic est « défaut de fonctionnement ». 
C’est exactement pour cette raison, pour cet type de conclusion que je ne lis pas les manuels d’utilisation. 
La caractéristique de l’iMari à la maison est qu’il est persévérant, voire buté, il va jusqu’au bout malgré les obstacles et comme il est équipé de nombreux iDevices, il cherche sur son iPad des aides à son « défaut de fonctionnement ». De tuto YouTube en tuto YouTube sur les défauts de fonctionnement il finit par écouter de bout en bout un tutoriel pour la réparer. 
En allemand. 
Vers 7h30 le matin. Au petit-dejeuner. Sans café.
Je lis sur le journal du déprimé, sur fond sonore en allemand pour réparer le défaut de fonctionnement de la machine à café. J’ai trouvé que j’avais touché le fond et j’ai décidé de changer de livre. 
 
Acheter des livres pour ne pas les lire ; aller à des concerts, mais que ce soit ni pour les écouter, ni pour voir ce qui se trouve là, faire de longues promenades parce qu’on est fatigué de la marche à pied, et aller séjourner à la campagne pour la simple raison que la campagne nous assomme.
Le livre de l’intranquillité  - Fernando Pessoa

J'ai décidé de lire quelques pages du journal du déprimé puis à la deuxième tasse de thé de passer à autre chose de plus gai, un truc qui me stimulerait et qui me donnerait envie de me lever -, qui me ferait passer par-dessus le tuto en allemand de la machine à café.
C’était une sage et grande décision. Parce que le lendemain (et quelques uns des jours suivants) ce n’est plus ni le tuto ni l’allemand que j’avais au petit déjeuneur, mais la machine totalement démontée sur la table. Une machine à café compacte quand elle fonctionne, occupe beaucoup de place une fois en pièces détachées.
Chose jetée dans un coin chiffon tombé en chemin, mon être ignoble se déguise en présence de la vie.
Le livre de l’intranquillité  - Fernando Pessoa

Ma vie ne pouvait être ça, boire mon thé en face de pièces détachées d’une machine en défaut de fonctionnement en lisant les pensées déprimées de Pessoa.
J’ai définitivement posé le livre de l’intranquillité et je suis passée à une couverture rouge, écrite par une femme, une écriture vive, vibrante qui fait sourire, rire et qui varie de la poésie, au récit à l’essai. 
Je voudrais simplement que tu fasses quelque chose de toi est ce qu’il me faut le matin, et le reste de la journée pour surmonter les tuto en allemand et les pièces étalées sur la table. 
 
Conseil de mon père au sujet du sexe quand j’avais quinze ans 
Pas de sexe avant ta mort 
Je souhaite seulement que tu fasses quelque chose de toi  - Hollie McNish

Ca devrait se terminer cette semaine, puisque qu’un copain est venu avec un fer à souder, les explications ont été données en français pour son utilisation, et la machine devrait retrouver son aspect compact, et sa place dans la cuisine, mon iMari son café gouteux ce qui lui passera peut être le goût d’écouter dès le matin de trucs en allemand (ou en polonais parfois) en buvant son breuvage lyophilisé.
 
En attendant Pessoa est resté tranquille dans son coin, tandis qu’Hollie poursuit sa course folle 
 
Recevoir un compliment
Pour ce moment où dans tous les films d’ados que j’ai regardés, le garçon déclare un amour à la fille en insultant toutes les autres filles de la planète et elle sourit comme si enfin sa vie valait d’être vécue et le laisse l’embrasser et où j’aimerai qu’elle dise ceci à la place (avant de l’embrasser si elle le veut toujours) mais elle ne le dit pas, soit parce qu’elle n’a pas pu accéder à l’écriture du script, soit parce qu’après avoir vu tant de films semblables en grandissant elle aussi croit que si elle attire ce garçon c’est parce qu’elle est différente des autres salopes stupides et ennuyeuses qui l’entourent. 
 
il la trouve intelligente
il la trouve spéciale
il la trouve drôle
il la trouve pleine d’esprit 
 
il dit
qu’elle n’est pas comme les autres filles
 
elle répond
si
 
si 
bien sûr que si
 
Je souhaite seulement que tu fasses quelque chose de toi  - Hollie McNish

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