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Brutale et radicale, la Solonas contemporaine

Françoise Pétrovitch, expo derrière les paupières à la Bnf

A l'opposé de Franzen, il y a Despentes. Pas de Dieu, mais des cas de consciences, des cas de vie plutôt. Sans en faire tout un plat, mais un livre bien sûr, qui n'a rien de moral, ni de moralisateur.

Despentes, c'est la Solanas contemporaine. J'adore la radicalité, la brutalité, l'absence de recherche de consensus. On s'en fout d'être aimé, d'être apprécié. Ce n'est pas non plus la provocation pure, c'est être et dire sans se poser la question de l'accueil, de l'effet de la réception. 

Décidément plutôt crever que de faire du yoga. 
Cher Connard - Virginie Despentes.

Le livre a fait le buzz à la rentrée. Nommé comme le livre "féministe" par excellence. Ce n'est pas un livre féministe, c'est un livre de son temps, qui parle des sujets de son temps et qui prend le temps de décortiquer les points de vue, sans dire ni la bonne parole, ni la bonne action. Il décrit l'ambivalence, la complexité des relations hommes-femmes, la façon dont on est pris dans la sociéte, les habitudes et les impensés. 

Beaucoup de critiques l'ont nommé "le livre de l'après #metoo", pas certaine que ces critiques aient lu le livre, chapitre après chapitre, phrase après phrase. C'est surtout un livre sur la désintoxication. De l'alcool, de la cocaïne, de l'héroïne et de tout un tas de substances que je connais pas, et des réseaux sociaux. J'en ai plus appris sur pourquoi on se drogue, le plaisir de se droguer (ou de se saouler), les façons d'en sortir, ce que ça cache ou ce qu'on cherche à éviter quand on est high, loaded...ou atout autre adjectif qui qualifie "sous influence". 

Aucun des personnages n'est attachant (comme chez Franzen), ni n'est un repère ou un modèle de comportement. Peu importe d'ailleurs,  on comprend chaque point de vue, j'ai été en empathie avec chacun d'eux, et les ai aussi détestés à d'autres moments. Ce sont des personnes réelles, ni belles ni justes, ni tout le temps nickel. En action, en réflexion, en évolution. Et c'est ça qui est optimiste.

Quelque chose déconne dans tout ça – et je me sens mec, et je me sens blanc, c’est-à-dire incapable d’imaginer comment cesser d’être une partie de ce problème pour passer du côté de la solution. Cher Connard de Virginie Despentes 

C'est ce que le personnage masculin se dit à un moment. C'est ce que j'aimerai que mon iMari se dise (peut-être un jour) mais il faudrait alors que ce soit entre deux articles du Monde (ce journal hyper conformiste qui se veut avant-gardiste) ou Les Échos (alors dans un chronique de JM Vittori ?) ou mes iAdos, alors il faudrait que ce soit sur Instagram ou YouTube pour qu'ils le voient. 

Et pourtant je suis comme son personnage féminin, je suis plutôt magnanime. Quoique parfois, quand je rappelle (encore une fois) ce qui est injuste, inégal ou inéquitable et qu'ils lèvent les yeux au ciel, je sens que pourrait l'être moins (magnanime) : 

Pourtant nous sommes plutôt magnanimes. Les hommes, nous ne les avorterons pas, nous ne les priverons pas d’éducation, nous ne les brulerons pas sur un bûcher, nous ne les tuerons pas dans les rues, nous ne les tuerons pas lorsqu’ils font leur jogging, nous ne les tuerons pas dans les bois, nous en les tuerons ps dans nos maisons, nous ne leur ferons pas honte d’être nés de leur sexe, nous ne les affamerons pas, nous ne les violerons pas, nous ne les toucherons pas sous les tables, nous ne les dénigrerons pas parce qu’ils désirent du sexe, nous ne leur interdirons pas l’espace public, nous ne les exclurons pas des cercles de pouvoir, nous ne les mutilerons pas, nous ne leur interdirons pas de s’habiller comme ils l’entendent, nous ne les forcerons pas à enfanter, nous ne les culpabiliserons pas quand ils ont une passion qui les éloigne du foyer, nous  ne les déclarerons pas fous lorsqu’ils ne sont pas de bons époux, nous ne confisquerons pas leur sexualité, nous ne surveillerons pas leurs faits et gestes et leurs déclarations comme s’ils nous appartenaient, nous ne réclamerons pas de voir leur cheveux, nous ne frapperons pas d’ignominie ceux qui désobéissent. Quand nous parlons égalité, nous ne parlons pas de cette égalité là.

Cher Connard de Virginie Despentes 

Et si j'étais moins magnanime, je me rapprocherai d'une autre de ses personnages, lesbienne et créative  : 

- Demande lui un doigt. De se couper un doigt.  
On n’a pas su quoi répondre. Corinnne a développé
 - Il a pris quelque chose de ton intégrité. Tu prends quelque chose de la sienne. Tu dis qu’il t’a mutilé ? ll se mutile. Il y repensera chaque fois qu’il voit sa main.
J'aime bien Despentes, même si je fais du yoga et que je me drogue pas, même si je suis hétéro et que je ne jure pas, même si j'ai des enfants et que je ne suis pas radicale et trop bourgeoise. Elle me fait du bien et m'aère les chakras et plus que ça elle me donne envie de penser différemment. Ça sert aussi à ça la littérature, à déranger et à voir au delà.

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