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Vive déception (#Pete Fromm)

Quetico national Park - Ontario Canada

L'inconditionnelle de Pete Fromm que je suis s'est forcement jetée sur son dernier roman "le lac de nulle part". Aussitôt sorti, aussitôt lu. Aussitôt déçue. 

Si vous n'avez jamais lu Pete Fromm ne commencez pas par celui là, évitez le. 
Oublions-le. 

Ce roman a tous les ingrédients Pete Fromm,  plus un de trop. 
Un à la mode si j'ose le dire ainsi. Et c'est celui qui rend l'histoire banalement tendance et finalement pas crédible. 
Il m'énerve à s'être aventuré là, à la légère. Encore un qui croit pouvoir en parler parce qu'il se pense féministe, ou du côté des femmes et qui veut sans doute les défendre.
Et qui a manqué l'occasion de se taire.

Attention, dans ce qui suit, je raconte l'histoire et je révèle l'intrigue. Il n'y aura plus de surprise.

C'est un père qui a quitté sa femme et ses enfants quand ils étaient adolescents et qui les recontacte jeunes adultes pour une escapade en canoë en novembre dans le Grand Nord Canadien. Evidemment les deux jeunes adultes répondent à l'appel, le fils parce qu'il a perdu son boulot et vit dans sa voiture depuis quelques semaines et n'a rien d'autre à faire. La fille, on comprendra à la fin que c'est par vengeance. 
Ce livre commence lentement, pas du tout avec la même intensité que ces autres roman. 
Descriptif de ce qui se passe à l'aéroport plus que des personnages et des relations entre eux. Les caractères mettent du temps à se dessiner, ça ressemble à un brouillon qui n'aurait pas été relu, et qui a perdu les traits des caractères entre le début et la fin. C'est le cas du ranger Chad (personnage secondaire) qui agit dans les derniers chapitres comme s'il était totalement différent du personnage rencontré au début. 

Le plus touchant reste le fils: Trig qui s'occupe de tout le monde. La fille est un personnage totalement imaginé, elle n'a rien de crédible. Le père est inconsistant, on devine rapidement qu'il a la maladie d' Alzeihmer, et finalement le fait qu'il disparaisse nous laisse de glace (c'est le cas de le dire), sauf le fils malgré ce qu'il découvre sur son père. 

Comme d'habitude, le personnage le plus présent, le mieux décrit, le plus conséquent et celui que je préfère c'est la nature (comme quand il parle de la pluie dans le nom des étoiles). C'est une région en Ontario, dans Quetico Park magnifique (j'ai regardé les paysages  - vive internet) et sur le site officiel effectivement le parc ferme aux visites mi octobre à cause du mauvais temps, de la neige et de la glace qui rend impraticable le canoë.

Le pitch : le père disparait une nuit du campement, les enfants (jeunes adultes) ne le retrouvent pas et doivent faire demi tour à cause du temps, et se retrouvent sans carte, avec peu de nourriture et la neige qui change le paysage.
Et la soeur lêche son info : le père qui se rend compte qu'il perd la tête lui demande si dans la réalité il l'a violé. Elle confirme. On sait peu de choses sur le viol par le père, et ce n'est pas utile pour l'histoire. Mais sa réaction à elle n'a rien de réelle, c'est de la pure fiction, de l'édulcoration, un peu de piment, que dis-je de sel dans l'histoire. 

A quel moment dans la réalité un père demande à sa fille de confirmer ce type de fait parce qu'il perd la tête? 
A quel moment quand il arrive des choses pareilles la fille mène une vie normale, accepte de partir un mois avec son père, de lui parler, de n'être qu'en colère et de passer à autre chose?

Il suffit d'écouter ou de lire ce que disent les victimes d'inceste et de violences sexuelles pour comprendre que ce qui est décrit dans cette histoire n'est que fiction, qui banalise la violence comme un fait divers, voire un événement de vie. 
C'est certainement plein de bonnes intentions, mais il aurait fallu alors chercher à comprendre et à retranscrire le vécu des victimes de violences sexuelles et leurs réactions. Elles sont aussi diverses qu'il y a de victimes, il suffit d'écouter les séries de Podcast de La Poudre (épisodes #101 à 108) pour savoir qu'il n'y a pas de comportement type. Et pour savoir que ce qui est raconté dans le livre est juste trop loin de n'importe quelle forme de réalité. 
C'est un événement de vie bien différent de "je me suis cassée un jambe" et laisse des traces qui sont totalement invisibles, masquées, oubliées ? 
Peut-être que de tuer son père aide, mais c'est d'abord un passage à l'acte plus que d'apprendre à vivre avec. Tout n'est pas qu'affaire de vengeance. Ça en fait une histoire très américaine : se faire justice soit même, et c'est réglé.

Je suis tellement déçue. Il y a un côté bâclé dans ce roman. 
Il aurait pu lire "My absolute Darling" de Gabriel Tallent, ils sont chez le même éditeur en France (Gallmeister). 
Il aurait pu se renseigner sur le vécu des personnes victimes de violences sexuelles; il aurait du... écrire une autre histoire comme il sait le faire sur des gens qui apprennent à vivre avec la maladie, la mort, la naissance, l'éloignement. Des relations de gens qui s'aiment et apprennent à faire avec la vie. 
Il est passé totalement à côté du sujet, sans qu'on sache d'ailleurs bien quel est-il, sans utiliser son merveilleux talent de nous parler des relations entre les gens.

Ça en fait un si mauvais roman, alors qu'il écrit si bien. 

Bonus : 
Sur l'inceste : une série de France Culture en 4 épisodes dans l'émission LSD.


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