Le female gaze n'est pas lié à l'identité du créateur ou de la créatrice mais au regard généré par la film (...)
Ce serait donc un regard qui donne une subjectivité au personnage féminin, permettant ainsi au spectateur et à la spectatrice de ressentir l'expérience de l'héroine sans pour autant s'identifier à elle. La différence entre ressentir et s'identifier est capitale (...) le female gaze n'est pas un portrait de femme, la question n'est pas seulement d'avoir un personnage féminin comme personnage principal, mais d'être à ses côtés.
C'est un essai, précis comme tel, et donc avec de nombreuse références conceptuelles, qu'elle cite abondamment, comme souvent les femmes, craintives qu'on les renvoie en coulisse par manque de solidité "scientifique". Elle nous explique que le female gaze se réfléchit à travers deux approches :
D'abord en réfléchissant ce qui se passe au sein du film : comment est ce que le personnage de fiction féminin est un corps traversé par une histoire? Comment l'expérience vécue de ce personnage est mise en scène? Ensuite en nous permettant de sortir d'une réflexion sur l'identification des spectateur·trices aux personnages pour se focaliser sur le ressenti. Comment nous ressentons l'expérience typiquemnt féminine du personnage en tant que spectateur et spectatrice?
Il est ainsi possible de faire abstraction du genre et de l'identité des spectateur·trices pour ne réfléchir qu'à la représentation du genre dans la fiction.
Comme c'est une femme pratico-pratique elle donne les 6 points qu'il faut regarder du point revue du female gaze, il y en autant que l'histoire que sur la technique. J'y ai ainsi découvert ce qu'est le regard scopique : cette façon de filmer les corps (des femmes) par morceau, souvent les "morceaux" qu'on imagine avec un pouvoir érotisant. Et que toutes les scènes de sexe au cinéma se ressemblent beaucoup, ils découpent façon puzzle le corps des femmes.
Evidemment, un chapitre sur le viol au cinéma : toutes ces scènes qui sont des viols et qui sont montrés comme des scènes de sexe où finalement le "non" veut dire "oui" et où la victime finit par être contente (et donc consentante). A commencer par le film culte "Blow up". Elle y raconte aussi que le plus étonnant reste le vécu des acteurs qui ne pensent pas jouer une scène de viol, alors que c'en est une, et ainsi elle décortique quantité de films de Claude Bresson à Game of Thrones.
Je ne regarde plus les films de la même façon après cette lecture. C'est comme souvent, une fois que le voile s'est levé, plus possible de tourner la tête, plus possible de ne pas voir, le décodeur s'est mis en route.
Le female gaze, c'est donner à voir, à ressentir une expérience dans un corps féminin (ou trans ou queer...enfin autre qu'un homme blanc cis), c'est ajouter à notre actif d'autres expériences, d'autres vies que la nôtre, et qui ne sont pas formatés par la norme sociale du masculin.
Moi, dès que je peux vivre d'autres vies en plus de la mienne je prends! Je suis trop curieuse.
Même si, en vrai, je n'aime pas toute ces vies et je doute de toutes les comprendre. Je regarde en plusieurs fois, sur plusieurs mois la série "I may destroy you". Je ne m'y attache pas : je suis trop vieille, trop claire, pas assez droguée, trop bourgeoise pour m'identifier, mais j'ai accès à d'autres expériences.
Et bonus, Iris Brey en podcast ici sur Spotify, ou directement sur le site de La Poudre épisode 75.
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